La genèse du festival Mardi Graves – Au coeur de la création musicale
Le festival Mardi Graves a choisi d’enrichir le répertoire des instruments graves et de valoriser la création musicale.
Quelques mots sur « Fata Morgana I » – Matthieu Ané
Fata Morgana fait référence au phénomène physique exceptionnel provoqué par la combinaison de mirages à la surface de la mer, dont les réfractions font apparaître des images suspendues d’objets situés sous l’horizon. Fata Morgana est un phénomène extrêmement instable qui ne dure généralement que quelques minutes ; lorsqu’il cesse, l’objet, dont les dimensions verticales étaient ainsi agrandies, prend souvent des proportions extrêmement réduites. Le nom Fata Morgana vient de l’italien, « la fée Morgana », suite à l’observation d’étranges châteaux au-dessus de la mer Méditerranée au Moyen-Âge, entre l’Italie et la Sicile. Le titre de l’œuvre dénonce de manière détournée le projet de construire une ville futuriste du nom de NÉOM au milieu du désert d’Arabie Saoudite. Neom est un projet fou : une ville flottante sur la mer Rouge, un lac artificiel et des stations de ski dans les montagnes du Hedjaz, des tunnels pour traverser les montagnes du désert et un aéroport d’une capacité de 100 millions de passagers par an. Et surtout THE LINE, une mégapole futuriste aux deux façades en miroir, en ligne droite sur 170 km. Objectif : 1 million d’habitants en 2030, 9 millions en 2045. Avec le système d’association de notes de musique à des lettres alphabétiques, vous pourrez entendre tout au long de la pièce le motif musical NEOM associé aux lettres N (sol) E (mi) O (la) M (fa/fa#). L’œuvre est composée de 4 parties bien distinctes : parties 1 et 3 mystérieuses et libres dans l’écriture, évoquant des formes changeantes, furtives et difficiles à percevoir comme la « fata morgana ». Les deux autres parties sont beaucoup plus rythmées et proches du jazz dans leur style. Dans la 2ème partie, l’ambiance un peu « lounge » qui se dégage au début à travers la pattern jouée pizzicato par la contrebasse (et qui évoque les milieux d’affaires) va vite se disloquer pour revenir à la forme d’un mirage. La 4ème partie, tel un final rapide, intègre un nouvel instrument, le mélodica, et va progressivement générer une tension rythmique et harmonique qui va aboutir à un point de rupture. Pour conclure, c’est un retour à l’illusion, au mirage, avec le thème de Neom qui apparaît en filigramme sur les trois instruments. L’ostinato rythmique présent est un hommage au début de « music for pièces of wood » du compositeur américain Steve Reich.
Quelques mots sur « La bestiole exploratrice » – Jean Marc Fouché
Nous voici en présence d’un exemple d’association de timbres et de couleurs avec « La Bestiole Exploratrice », sorte de court-métrage musical animalier écrit spécialement pour Mathieu Salas et Félix Péreira (contrebasse et trombone). Création mondiale pour cette pièce à l’occasion de l’édition 2025 du festival Mardi Graves. Le titre suffira à toute explication métaphorique de cette pièce… A chacun d’en faire son histoire pendant qu’il l’écoute… Que sera, qui sera donc cette « bestiole » ? Peut-être vous-même, grâce à cette saine curiosité qui vous poussera à venir « explorer » des notes de musique jamais entendues auparavant…
Quelques mots sur « Tyran cruel, aimable dieu… » – Claude-Henry Joubert
Cantate pour baryton fervent et contrebasse accorte. Cet aimable dieu cruel c’est naturellement Cupidon. Un baryton fervent est un baryton qui témoigne d’une chaleur enthousiaste, en un mot : « bouillonnant » ! À Mardi-Graves, on connaît bien la contrebasse à cordes. La contrebasse « accorte » est un peu spéciale ; elle est avisée, habile, accommodante, souple, courtoise, aimable, enjouée et gracieuse… Le texte ? Des poèmes galants, vifs et amoureux de Joseph, François, Edouard de Corsembleu Desmahis. Un poète oublié, mort à 39 ans en 1761, qui vivait dans la belle ville de Sully-sur-Loire. Un quatrain dit tout sur les désirs du poète : « Aimer une coquette, aimer une infidèle, Aimer une volage, aimer une cruelle, Ce sont là des tourments qu’on ne peut exprimer, Mais le plus grand de tous est de ne point aimer. » Et pourquoi avoir écrit cette cantate ? Pour réunir deux amis enthousiastes, bouillonnants, aimables, enjoués et gracieux : Nicolas Rivenq et Bernard Cazauran.
Quelques mots sur « Bel Hérault » – Bernard Langlois
Le thème principal énoncé au basson est composé sur les notes: la#, mi, ré#, la, sol#, mi, fa suivant le vieux principe d’attribution de notes aux lettres de l’alphabet à partir du la = A, si = B, do = C etc… Ainsi: H sera la (# pour le différencier du la suivant qui est A… et aussi parce que ça me plait…) E = mi R = ré (#) A = la U = sol (#) L = mi T = fa Entre plusieurs rapides en sextolets viendra une large tenue où chacun des 3 instruments jouera sa note la plus GRAVE et qui servira de base harmonique dans le passage rythmique suivant. Ensuite se superposera le thème de l’HERAULT toujours entrecoupé de petits rapides et bientôt entraîné par les quintolets de la clarinette basse. Puis apparaitront le rythme du fameux BOLERO et des jeux sur la tête de sa mélodie avec des renversements, des rétrogradations… qui vont donner naissance à un paisible canon… avant le retour de l’HERAULT… mais… nous sommes arrivés à AG